En mars 2017, les élèves de TL ont choisi de travailler sur un objet de culture populaire afin d’en dégager une question philosophique et un argumentaire.
Avertissement : Ces propositions de pop philosophie ne prétendent à aucune exhaustivité ni à aucune perfection, ce sont au sens propre des essais imparfaits, souvent inachevés, mais qui proposent quelques pistes de réflexion à partir de la culture populaire.
Agathe propose une analyse philosophique du film Balada Triste, réalisé par Alex de la Iglesia en 2010, à partir de la question :
Le 27 avril 2017, dans le cadre du programme Lycéens au cinéma, les élèves de Terminale L ont procédé à l’analyse philosophique du film de Rithy Pahn : L’image manquante (2013).
Le 31 janvier 2017, dans le cadre du programme Lycéens au cinéma, les élèves de Terminale L ont procédé à l’analyse philosophique du western de John Ford : The Man who shot Liberty Valance (1962).
En janvier 2017, les élèves de TL du lycée René Cassin ont enregistré une émission de radio mettant en scène différents points de leur cours de Philosophie sur la liberté : ils y abordent la question du choix libre, de la contingence et de la capacité à agir autrement ; de l’expérience de Libet, du déterminisme et du hasard, du fatalisme ; de la liberté selon Epictète et de la capacité à lutter contre soi-même selon Harry Frankfurt.
On demande comment les particuliers n’ayant point droit de disposer de leur propre vie peuvent transmettre au souverain ce même droit qu’ils n’ont pas ? Cette question ne paraît difficile à résoudre que parce qu’elle est mal posée. Tout homme a droit de risquer sa propre vie pour la conserver. A-t-on jamais dit que celui qui se jette par une fenêtre pour échapper à un incendie soit coupable de suicide ? A-t-on même jamais imputé ce crime à celui qui périt dans une tempête dont en s’embarquant il n’ignorait pas le danger ?
Le traité social a pour fin la conservation des contractants. Qui veut la fin veut aussi les moyens, et ces moyens sont inséparables de quelques risques, même de quelques pertes. Qui veut conserver sa vie aux dépens des autres doit la donner aussi pour eux quand il faut. Or le citoyen n’est plus juge du péril auquel la loi veut qu’il s’expose, et quand le Prince lui a dit : Il est expédient à l’Etat que tu meures, il doit mourir ; puisque ce n’est qu’à cette condition qu’il a vécu en sûreté jusqu’alors, et que sa vie n’est plus seulement un bienfait de la nature, mais un don conditionnel de l’Etat.
La peine de mort infligée aux criminels peut être envisagée à peu près sous le même point de vue : c’est pour n’être pas la victime d’un assassin que l’on consent à mourir si on le devient. Dans ce traité, loin de disposer de sa propre vie on ne songe qu’à la garantir, et il n’est pas à présumer qu’aucun des contractants prémédite alors de se faire pendre.
D’ailleurs tout malfaiteur attaquant le droit social devient par ses forfaits rebelle et traître à la patrie, il cesse d’en être membre en violant ses lois, et même il lui fait la guerre. Alors la conservation de l’Etat est incompatible avec la sienne, il faut qu’un des deux périsse, et quand on fait mourir le coupable, c’est moins comme citoyen que comme ennemi. Les procédures, le jugement, sont les preuves et la déclaration qu’il a rompu le traité social, et par conséquent qu’il n’est plus membre de l’Etat. Or comme il s’est reconnu tel, tout au moins par son séjour, il en doit être retranché par l’exil comme infracteur du pacte, ou par la mort comme ennemi public ; car un tel ennemi n’est pas une personne morale, c’est un homme, et c’est alors que le droit de la guerre est de tuer le vaincu.
Mais, dira-t-on, la condamnation d’un criminel est un acte particulier. D’accord ; aussi cette condamnation n’appartient-elle point au souverain ; c’est un droit qu’il peut conférer sans pouvoir l’exercer lui-même.
ROUSSEAU, Du Contrat social (1762), II, chapitre 5 “Du droit de vie et de mort”, §§1-5
Questions :
Selon Rousseau, les citoyens qui signent le pacte social engagent-ils leur vie ? Justifiez.
Expliquez « c’est pour n’être pas la victime d’un assassin que l’on consent à mourir si on le devient ». De quel type de justification s’agit-il ?
Pourquoi est-il légitime selon Rousseau d’invoquer le droit de la guerre contre un citoyen ? Expliquez.
Une explication orale proposée par Estelle, Caroline, Louise et Amélie (TL, 2017) :
Il s’ensuit de ce qui précède que la volonté générale est toujours droite et tend toujours à l’utilité publique : mais il ne s’ensuit pas que les délibérations du peuple aient toujours la même rectitude. On veut toujours son bien, mais on ne le voit pas toujours. Jamais on ne corrompt le peuple, mais souvent on le trompe, et c’est alors seulement qu’il paraît vouloir ce qui est mal.
Il y a souvent bien de la différence entre la volonté de tous et la volonté générale ; celle-ci ne regarde qu’à l’intérêt commun, l’autre regarde à l’intérêt privé, et n’est qu’une somme de volontés particulières : mais ôtez de ces mêmes volontés les plus et les moins qui s’entre-détruisent, reste pour somme des différences la volonté générale.
Si, quand le peuple suffisamment informé délibère, les citoyens n’avaient aucune communication entre eux, du grand nombre de petites différences résulterait toujours la volonté générale, et la délibération serait toujours bonne. Mais quand il se fait des brigues*, des associations partielles aux dépens de la grande, la volonté de chacune de ces associations devient générale par rapport à ses membres, et particulière par rapport à l’Etat ; on peut dire alors qu’il n’y a plus autant de votants que d’hommes, mais seulement autant que d’associations. Les différences deviennent moins nombreuses et donnent un résultat moins général. Enfin quand une de ces associations est si grande qu’elle l’emporte sur toutes les autres, vous n’avez plus pour résultat une somme de petites différences, mais une différence unique ; alors il n’y a plus de volonté générale, et l’avis qui l’emporte n’est qu’un avis particulier.
ROUSSEAU, Du Contrat social (1762), II, chapitre 3 “Si la volonté générale peut errer”
* “brigue” : quand un groupe particulier organise des manoeuvres et exerce une pression sur le pouvoir pour servir ses propres intérêts, comme un “lobby”, groupe de pression à l’époque moderne.
Questions :
Quel est le paradoxe du désir individuel ? Expliquez.
Expliquez « Jamais on ne corrompt le peuple, mais souvent on le trompe » en définissant les verbes soulignés.
Comment Rousseau définit-il la « volonté générale » ? Reformulez.
Quel danger Rousseau dénonce-t-il en démocratie ? Expliquez.
Une explication orale, proposée par Cassandra, Flora et Coline :
La première et la plus importante conséquence des principes ci-devant établis est que la volonté générale peut seule diriger les forces de l’Etat selon la fin de son institution, qui est le bien commun : car si l’opposition des intérêts particuliers a rendu nécessaire l’établissement des sociétés, c’est l’accord de ces mêmes intérêts qui l’a rendu possible. C’est ce qu’il y a de commun dans ces différents intérêts qui forme le lien social, et s’il n’y avait pas quelque point dans lequel tous les intérêts s’accordent, nulle société ne saurait exister. Or c’est uniquement sur cet intérêt commun que la société doit être gouvernée.
Je dis donc que la souveraineté n’étant que l’exercice de la volonté générale ne peut jamais s’aliéner, et que le souverain, qui n’est qu’un être collectif, ne peut être représenté que par lui-même ; le pouvoir peut bien se transmettre, mais non pas la volonté.
En effet, s’il n’est pas impossible qu’une volonté particulière s’accorde sur quelque point avec la volonté générale, il est impossible au moins que cet accord soit durable et constant ; car la volonté particulière tend par sa nature aux préférences, et la volonté générale à l’égalité. Il est plus impossible encore qu’on ait un garant de cet accord quand même il devrait toujours exister ; ce ne serait pas un effet de l’art mais du hasard. Le souverain peut bien dire : Je veux actuellement ce que veut un tel homme ou du moins ce qu’il dit vouloir ; mais il ne peut pas dire : Ce que cet homme voudra demain, je le voudrai encore ; puisqu’il est absurde que la volonté se donne des chaînes pour l’avenir, et puisqu’il ne dépend d’aucune volonté de consentir à rien de contraire au bien de l’être qui veut. Si donc le peuple promet simplement d’obéir, il se dissout par cet acte, il perd sa qualité de peuple ; à l’instant qu’il y a un maître il n’y a plus de souverain, et dès lors le corps politique est détruit.
ROUSSEAU, Du Contrat social (1762), II, chapitre 1 “Que la souveraineté est inaliénable”
Questions :
Pourquoi la société a-t-elle selon Rousseau une fonction paradoxale ? Expliquez.
Comparez l’usage du mot « souverain » dans les paragraphes 1 et 2. Quelle différence ?
Quel type de démocratie Rousseau condamne-t-il ? Justifiez.
Quel est le défaut de toute « volonté particulière » dont parle Rousseau ? Expliquez.
Une explication orale proposée par Clara, Tiphanie et Lola :